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Chapitre V : Bucarest

Extrait

 

    ...

    Le temps de dénicher essuie et sortie de bains dans tout mon fouillis, court vêtue je tourne la clef dans ma serrure. J’ouvre la porte avec précaution et me glisse dehors en refermant à double tour. La nuit règne et le bruissement qu’émet le train sur les rails est roi. Jetant un Å“il au travers de la vitre la plus proche, je ne discerne au-delà des ombres qu’un léger rosissement sur la ligne d’horizon. Malgré toute cette noirceur qui m’entoure, quoi que de faible intensité, les points lumineux encastrés dans le plafond vont suffire à m’orienter. C’est donc d’un pas sûr que j’arpente le couloir de notre wagon, en direction des sanitaires publics qui se trouve au tiers du convoi. Traversant la voiture d’après, je constate qu’ici aussi, nulle chatte ne miaule à part la mienne. Il est vrai qu’à cette heure indue, l’éventualité dans les parages de rencontrer âme me semble quasi nulle. Cependant, l’accès au couloir suivant va tout faire pour me contredire. Au beau milieu de celui-ci, j’aperçois une présence massive dans l’épaisseur de la nuit. M’avançant avec prudence– un crime est si vite arrivée, Agatha m’en est témoin â€“ je constate en fait que la forme imposante est double. Serrant à mort la clef de mon compartiment entre mes phalanges moites, je me tiens sur mes gardes.

    Haut les cÅ“urs !

    Prête à me servir des quelques notions de self défense apprises à grand-peine, j’imagine déjà comment porter le premier coup. Mais alors que je vais croiser mes agresseurs, ceux-ci se bougeant juste ce qu’il faut pour me laisser le passage, je les reconnais aussitôt. Accros aux films de charme, ce sont les tourtereaux de la veille. Accolés à la paroi vitrée, leurs regards semblent se perdre au-delà du paysage nocturne. Tenue par la taille, la fille a passé le haut d’un pyjama, tandis que l’amant porte le bas. Retroussée sous la caresse mâle, sa croupe s’anime en s’exhibant dans la pénombre. Au moment de les dépasser, l’air de rien, m’ayant sans doute reconnue, la petite rousse me gratifie d’un sourire ambigu. Lui souriant à mon tour, j’entrevois qu’elle aussi n’est pas en reste, une main disparaissant dans l’entrebâillement du pantalon. Rassurée, je passe mon chemin, un brin émoustillée par leur petite distraction...

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